Une affaire judiciaire bizarre sur le point de mettre en lumière le système judiciaire monégasque

Le procès pénal du ministre français de la Justice, Eric Dupond-Moretti, doit s’ouvrir le 6 novembre et se terminer le 17 novembre.

Centré sur des accusations de conflit d’intérêts, le procès se déroulera à Paris et non à Monaco.

Mais Monaco sera à l’honneur dans cette affaire qui fera forcément la Une des journaux français pendant deux semaines judiciaires.

M. Dupond-Moretti – le ministre qu’Emmanuel Macron a toujours refusé de limoger malgré de nombreuses erreurs – risque cinq ans de prison s’il est reconnu coupable, même si personne ne s’attend à une issue aussi prosaïque.

L’un des principaux fils de l’affaire concerne le bras de fer judiciaire de longue date entre le collectionneur d’art russe et résident monégasque Dmitry Rybolovlev et l’entrepreneur suisse Yves Bouvier concernant la vente de 38 œuvres d’art évaluées à 1,1 milliard d’euros.

Après avoir été avocat de Rybolovlev avant de devenir ministre de la Justice, Dupond-Moretti est accusé d’avoir mené une campagne de représailles contre les avocats qui s’étaient opposés à lui devant les tribunaux. Parmi les victimes présumées figure Edouard Levrault, un juriste français ayant travaillé dans le système judiciaire monégasque qui a poursuivi M. Rybolovlev.

Selon l’acte d’accusation consulté par Le Monde, Levrault a été démis de ses fonctions après une intervention du président Emmanuel Macron. Dans un geste très inhabituel, le juge Levrault a pris la parole sur les ondes pour exprimer son grief dans une émission spéciale.

Comme le rapporte Le journal d’art, Dupond-Moretti a porté plainte contre le juge et une enquête administrative a été ouverte contre le juge Levrault en juin 2020. Il a été innocenté de tout manquement disciplinaire à la mi-septembre. Dupond-Moretti est nommé ministre de la Justice un mois plus tard.

Dupond-Maserati*

Une concession automobile monégasque figure également en bonne place puisque c’est dans une concession Maserati de la Principauté qu’en 2013 l’irascible futur ministre a acheté une Maserati Grancabrio pour 95 158 euros, dont 75 000 payés par virement et le reste en espèces, selon documents vus par Médiapart.

Une Maserati Grancabrio

L’achat de la voiture intervient cinq jours après que Dupond-Moretti a reçu 100 000 euros d’un virement en provenance des Seychelles, comme l’a constaté Marc-Emmanuel Gounot, juge d’instruction à Lyon, au moment où l’avocat représentait Immanuel de Agrella, qui avait été détenu à Monaco aux côtés de Jean-Pierre Nitkowski, qui, en tant que chef d’une conspiration internationale à la Ponzi, avait été emprisonné pendant cinq ans.

« Éric Dupond-Moretti a défendu les intérêts de M. Immanuel di Agrella, qui ont fait l’objet d’une facturation et d’un recouvrement d’honoraires », a indiqué le cabinet Dupond-Moretti. Médiapart. La voiture a été vendue en quelques mois. Il n’existe aucune preuve d’actes répréhensibles de la part de Dupond-Moretti dans l’achat et la vente de la Maserati.

Cependant, pour un ministre en exercice, faire face à une piste criminelle alors qu’il est encore en fonction représente un nouveau territoire.

« C’est un gros problème pour Macron qui, en tant que candidat en 2017, s’est engagé à diriger un gouvernement qui serait au-dessus de tout reproche », a déclaré Bruno Cautrès, politologue à Sciences Po. Temps Financier, ajoutant que le président avait promis un jour que tout ministre faisant l’objet d’une enquête officielle devrait démissionner. « Les Français voient déjà le monde politique avec méfiance, et cela ne fera qu’empirer les choses », a déclaré Cautrès.

Alors que se déroule le procès de deux semaines du ministre français de la Justice, les projecteurs qui braquent leurs puissants projecteurs sur le système judiciaire monégasque laisseront également de nombreuses ombres sombres dans les coins.

Par ailleurs, Dupond-Moretti a suscité l’indignation généralisée début août lorsqu’à la fin d’une conférence de presse, il a souligné qu’« aucune des femmes journalistes qui m’ont interviewé n’était seins nus ». Il faisait très chaud à ce moment-là et le ministre de la Justice était à Aurillac, en France, pour inspecter les dégâts causés à un palais de justice par un groupe de femmes seins nus protestant contre les poursuites engagées contre une femme qui avait enlevé ses vêtements au-dessus de la taille parce qu’elle disait elle avait trop chaud et voulait l’égalité avec les hommes.

« Il ne faisait pas assez chaud ? » a demandé Éric Dupont-Moretti.

SOURCES ORIGINALES : Le Monde, Libération, The Art Newspaper, Financial Times, Mediapart, *Le Torchis, sources locales